Burn out

Burn out :

Ces dernières années, on entend parler de plus en plus du burn out. Cependant, c'est souvent un fourre tout, où on met le "ras le bol" général.  Qu'en est-il donc réellement plus précisément ?

 

Qu’est ce que le burn out ?

Le burn out, aussi nommé syndrome de l’épuisement professionnel, résulte d’un stress chronique lié aux conditions de travail qu'elles soient factuelles ou perçues. Il comprend 3 dimensions :

- épuisement émotionnel qui correspond à une fatigue intarissable, un sentiment d’être vidé par le travail, être à bout, épuisé et incapacité de récupérer malgré un week-end de repos.

- dépersonnalisation qui correspond au fait de ne plus être soi-même, ne plus se reconnaître, avec un manque d’empathie, une irritabilité. 

- perte d'accomplissement personnel :  tendance à se dévaloriser (tout ce qu'on peut entreprendre ne pourra suffir à avoir une bonne image de soi), perte de sens à ce qu'on fait (conflits de valeurs, dévalorisation)

L’échelle MBI (Maslach Burnout Inventory) permet d’évaluer le burn out.

Plus il y a de dimensions atteintes, plus le burn out est sévère.

On en parle beaucoup mais est ce si fréquent ?

Les étudiant-es et soignant-es sont particulièrement touché-es par le burn out. En effet, de façon générale, tous stades de burn out confondus, on retrouve aux alentours de 67%

Selon une étude co-menée par l'ANEMF, l'ISNI et l'ISNAR-IMG sortie en octobre 2021, 2/3 des étudiant-es en santé parmi les participant-es seraient en burn out  en France avec une dégradation des résultats depuis la précédente enquête réalisée en 2017.

En population générale, on estime que ce risque est d'environ 7 % en France (2)

 

Comment peut-on le reconnaître ?

Les signes et symptômes qui doivent alerter :

– dimension émotionnelle : irritabilité, anxiété, perte d’émotion, tristesse

– dimension physique : troubles du sommeil, douleurs musculaires

– dimension cognitive : difficulté de concentration, trouble de mémoire, difficulté à prendre des décisions

– dimension comportementale : isolement social, émotionnel

– dimension motivationnelle : perte de confiance en soi, perte de motivation

Ce phénomène s’installe de façon insidieuse, raison pour laquelle il est difficile de le déceler à un stade précoce. Lorsque les collègues, patient-es le remarquent, c’est souvent que le burn out est déjà bien installé.

 

Pourquoi est ce si fréquent dans nos études/milieu professionnel ?

C'est un problème systémique, multifactoriel.

Quelles sont les conséquences du burn out ? 

Le burn out a des conséquences majeures sur le quotidien des personnes touchées. En effet, pour ne citer que quelques exemples, c’est source d’isolement social, de perte de confiance en soi, de perte d’efficacité au travail, et peut être associé à des diagnostics psychiatriques tels que la dépression, ou bien le trouble anxieux.

 

Quelles sont les aides possibles ?

- en parler à des personnes de « confiance » au sein du service ou de l’hôpital

- médecine en santé du travail

- psychologues/psychiatres de la fac, bureaux d’aide psychologique universitaires

- structures universitaires et/ou hospitalières de soutien aux étudiant-es/soignant-es

- syndicats locaux (par exemple en Ile-De-France, SIHP (syndicat des internes des hôpitaux de Paris) avec SOS internes)

- Numéro d’écoute du CNA 0800 724 900

- Numéros écoute du CNOM 0 800 288 038

- médecin traitant, psychologue/psychiatre de ville

 

Quelles sont les pistes à l’avenir ?

- La prévention est un point fondamental. Un bon accompagnement des étudiant-es dans leur parcours universitaire, dans leurs stages, un espace parole pour débriefer des situations difficiles vues à l’hôpital, les premiers décès, des limitations, des annonces de maladie ….

- La sensibilisation sur le burn out est également fondamentale pour mettre fin au tabou, ouvrir la parole, mettre fin à la dichotomie « faibles » / « forts » qui n’a pas de sens, inadapté

- Intégrer dans le cursus des cours sur l'apprentissage de la réflexivité.

- Apprentissage à désamorcer un conflit

- Réfléchir aux causes structurelles du milieu de soin et de formation en santé, afin de remédier à ces facteurs de risque

- Les temps de recherche documentaire et travaux de formation universitaire des étudiant-es doivent être intégrés dans la journée et non  être fait le soir ou le weekend.

Laisser une place aux loisirs, réduire le temps de travail…équilibre vie personnelle et professionnelle

- Développement de structures d’aide, d’écoute, gratuites.

- Lutte contre le harcèlement.

 

Sources :

  1. https://www.caducee.net/actualite-medicale/15406/burn-out-dans-la-sante-98-des-soignants-reconnaissent-avoir-deja-ressenti-les-symptomes-de-l-epuisement-professionnel.html
  2. https://www.observatoire-ocm.com/societe/chiffres-burn-out/

https://www.observatoire-ocm.com/management/burn-out-souffrance/

https://www.cairn.info/revue-l-information-psychiatrique-2018-1-page-13.htm

https://www.has-sante.fr/jcms/pprd_2974265/fr/burnout-reperage-et-prise-en-charge

 

Pour aller plus loin :

Quelques articles sur le burn out

- Ariel Frajerman et al, COVID-19 pandemic's impact on French Health Students: A cross-sectional study during the third wave, J Affect Disord. 2022 Aug 15;311:165-172.

- F Rolland et al, Impact of the first wave of the COVID-19 pandemic on French Health students, Encephale. 2022 Feb 4;S0013-7006(22)00035-5.

- Samuel B Harvey et al, Mental illness and suicide among physicians, Lancet. 2021 Sep 4;398(10303):920-930.

-https://theconversation.com/une-enquete-nationale-revele-letat-de-sante-mentale-preoccupant-des-etudiants-en-medecine-186007

Communiqué de presse : douleurs chroniques

Communiqué de presse : douleurs chroniques

Les douleurs chroniques touchent de nombreuses personnes et ont des conséquences majeures au quotidien. Or, cette thématique est trop peu évoquée.

On estime qu'un quart de la population mondiale souffre de douleurs.

Les femmes sont statistiquement plus touchées que les hommes avec 37% de femmes douloureuses contre 28% pour les hommes.

Ces douleurs ont des conséquences majeures sur le quotidien et à long terme et entrainent un handicap. Isolement social, et parfois à l'incompréhension des proches, retentissement professionnel avec un arrêt ou reconversion professionnelle - Conséquences financières avec une perte du revenus et de très faibles aides au handicap ou pension d'invalidité.

Les douleurs peuvent entraîner des troubles anxieux ou des troubles dépressifs.

L'évaluation de la douleur est complexe puisque sujette à de nombreux biais.

Il n’est pas rare d’avoir une minimisation par les patient-es ou soignant-es.  Pour certain-es patient-es, un biais raciste que constitue le "syndrome méditerranéen" selon lequel les patient-es provenant du bassin méditerranéen auraient tendance à en rajouter (ce qui bien entendu est entièrement faux), est source de souffrance supplémentaire non traitée et de discrimination.

Les possibilités thérapeutiques médicamenteuses sont limitées pour une antalgie efficace. De plus, d’autres thérapeutiques non médicamenteuses peuvent être limitées à la prescription par les CETD Centre d’évaluation et traitement de la douleur. Ces centres sont, quant à eux, trop rares, ce qui rend les délais pour y consulter extrêmement longs. Les patient-es présentant des douleurs chroniques se retrouvent donc rapidement devant une impasse thérapeutique.

Au cours de nos études, cette thématique des douleurs est peu abordée entraînant bien trop souvent une insuffisance de traitement.

Il existe également une stigmatisation des patient-es qui vivent avec des douleurs chroniques. Ces patient-es sont souvent moins écouté-es, ou accusé-es de "simuler" ou d'aggraver leurs douleurs. Ces phénomènes sont d'autant plus importants pour les femmes.

Les personnes atteintes de douleurs chroniques font également face à la stigmatisation de certains soignant-es les considérant comme des « accros » aux médicaments.

 

Nos propositions pour améliorer la prise en charge des personnes atteintes de douleurs et en particulier douleurs chroniques

 

- Améliorer la formation des soignant-es concernant les différentes thérapeutiques aussi bien médicamenteuses que non médicamenteuses mais également sur les ressources disponibles et les moyens de les mettre en œuvre.

- Sensibiliser les soignant-es sur les fausses idées reçues concernant la douleur (risque addictif, syndrome méditerranéen, comportements toxicophobes etc) et mettre la prise en charge de la douleur bien plus au centre des prises en charge. Avoir mal représente un problème en soi et doit être traité avec les médicaments nécessaires sans minimisation de celle ci et ou de ses impacts.

- Augmenter de manière conséquente les projets et budgets de recherche dans le domaine de la douleur afin d'apporter des innovations thérapeutiques aux patient-es présentant des douleurs chroniques.

- Oeuvrer pour la création de plus de CETD, lutter contre l'idée que ces centres ne sont "pas rentables" et sensibiliser les soignant-es, administratif-ves et gouvernants à l'aspect primordial de la prise en charge de la douleur

- dans ces centres, importance de la prise en charge globale et des conséquences de ces douleurs : ne pas négliger les antalgiques classiques, mais aussi proposer de manière plus générale les techniques comme la rTMS ou la tDCS. Avoir plus de moyens pour recruter des psychologue/psychiatres specialise-es en douleur.

- Augmenter le nombre de postes de médecins de la douleur, par conséquent augmentation du nombre de places en DU/FST douleurs.

-Creer des urgences douleurs sur le modèle de celles existant pour les céphalées

- limiter les obstacles à l'obtention des antalgiques notamment de palier II et III, via une meilleure formation des pharmacien-nes, et via l'allongement des ordonnances pour les patient-es avec traitement au long cours.

- élargir la prescription de TENS à d'autres médecins (spécialistes ou généralistes) que les médecins de la douleur.

 

Interview du Dr Bailly, rhumatologue et médecin de la douleur.

Interview du Dr Bailly, rhumatologue et médecin de la douleur.

Nous vous présentons une interview que nous avons réalisé avec Dr Bailly rhumatologue et médecin de la douleur, à Paris concernant les douleurs chroniques.

 

Q1. Pour commencer, comment pourriez-vous décrire  succinctement la prise en charge de la douleur en France aujourd'hui ?

 

Bonjour, la prise en charge de la douleur en France est réalisée à plusieurs niveaux. Evidemment, il y a la formation initiale de tout médecin sur la prise en charge de la douleur. Il y a quelques années, la gestion de la douleur aiguë était principalement enseignée via l’utilisation des antalgiques. Actuellement, la formation est plus complète et illustre la prise en charge variable selon que l’on se trouve face à une douleur aiguë, chronique, neuropathique et évidemment selon le patient. De multiples possibilités existent également en formation continue. Le collège des enseignants de la douleur (https://www.college-douleur.org/ ), nouvellement créé, illustre ce renforcement de la formation.

 

Ensuite, pour certaines personnes présentant des douleurs réfractaires à une prise en charge de première et deuxième ligne, il existe des centres d’évaluation et de traitement de la douleur. Ce sont des structures labellisées par les ARS, dont la liste est disponible sur les sites des ARS, et pour lesquels la SFETD a réalisé une carte interactive pour trouver les coordonnées du centre le plus proche de son domicile (https://www.sfetd-douleur.org/structures-specialisees-pro/ )La limite principale reste les effectifs médicaux et paramédicaux limités de ces centres, ce qui implique des délais parfois longs.

 

Q2. Que pouvez-vous nous dire sur la coordination entre médecins généralistes, médecins spécialistes hors douleur et médecins de la douleur ? Et qu'en est-il avec les autres professionnels de santé ?

 

La coordination (et la coopération) est un vaste sujet et est très dépendante de chaque lieu. Il y a dans certains centres des réseaux ville hôpital qui permettent d’avoir une coordination entre des praticiens libéraux  (médecins, kinésithérapeute, psychologue et d’autres professionnels de santé) et de l’hôpital. Ces structures permettent des échanges notamment via des RCP réalisées régulièrement et permettent à des professionnels libéraux d’avoir des financements en partie via les ARS. Pour l’ile de France, il existe ce réseau : https://www.reseau-lcd.org/ qui est rattaché au centre de la douleur de Saint Antoine. Il propose des informations ainsi que par exemple des ressources de relaxation librement accessibles (ici : https://www.reseau-lcd.org/les-traitements-de-la-douleur/ )

 

Objectivement, la coordination se passe plus facilement avec les médecins de l’APHP depuis que nous avons tous accès aux comptes-rendus les uns des autres via le même logiciel métier. Je réalise des comptes rendus pour l’ensemble de mes consultations, et ils sont autant destinés aux patients (pour se souvenir de ce que j’ai dit ou fait) qu’aux collègues médecins ou paramédicaux qui prennent en charge le patient. Néanmoins, malgré quelques tentatives, les messageries de type MSSanté ne sont pas encore d’utilisation courante pour échanger entre professionnels.

 

Q3. Prescrivez-vous régulièrement de la kinésithérapie dans la prise en charge de la douleur ? Si oui dans quel cadre en particulier ? Avez-vous un réseau auprès de qui adresser vos patient-es en particulier ?

 

Je prescris très régulièrement de la kinésithérapie puisque la majorité des douleurs chroniques sont musculo-squelettiques, néanmoins il est en général nécessaire de faire plus qu’une prescription, il faut évaluer ce que le kinésithérapeute réalise en pratique. Certains kinésithérapeutes ne font que des techniques passives (chaleur, massage) alors que d’autres sont investis pour apprendre des mouvements ou techniques aux patients afin de les rendre autonomes. Le plus important est d’expliquer au patient ce qu’il doit attendre d’un kiné et ce qui n’est pas souhaitable. Ainsi la plupart arrivent à trouver des kinésithérapeutes utiles à leur prise en charge.

 

Q4. La prise en charge de la douleur aujourd'hui est assez critiquée par les patient-es : nombre de spécialistes qui la traitent peu ou mal, recours au CETD difficile, peu de traitements disponibles, impression qu'il y a peu de recherches sur le sujet. Une frustration des patient-es se ressent-elle sur ces sujets ?

 

Oui cette frustration est réelle et exprimée par de nombreux patients. Pour plusieurs raisons. Le douleur est souvent vue comme quelque chose de non urgent, d’un soin de « confort » alors que la qualité de vie des personnes qui ont des douleurs chroniques est très dégradée. Tout d’abord, certaines douleurs peuvent être guéries mais pour la plupart nous avons des moyens pour la diminuer mais pas la faire disparaitre. Or, l’attente des patients est souvent de « revenir comme avant », de « supprimer » le problème. Puisqu’il existe des antalgiques, il faudrait donner le bon médicament qui supprime le problème, or ce n’est pas toujours possible. Parfois j’illustre la douleur comme une cicatrice : une cicatrice existe même si le problème initial n’est plus présent, et il n’est pas possible de l’enlever entièrement.

 

La seconde critique fréquente est sur l’accès aux techniques non médicamenteuses : puisque les médicaments ne sont pas adaptés ou suffisants, il faut autre chose. Plusieurs techniques ont prouvé leur efficacité, par exemple l’hypnose, la relaxation, la méditation, l’activité physique. D’autres sont débattues ou sans fondement scientifique comme l’acupuncture, l’auriculothérapie ou la réflexologie plantaire. Or dans un centre de la douleur, il y a souvent une ou deux techniques disponibles mais jamais la totalité et les ressources sont limitées. Ces techniques existent souvent en ville, mais les patients ne peuvent souvent pas le payer.

 

Une autre critique est sur les délais de rendez-vous, à la fois pour les prises en charge initiales et pour les suivis. IL faut savoir que l’ARS nous demande de voir en moyenne un patient 2.4 fois par an, or certains aimeraient bien avoir des rendez-vous tous les mois, mais ce n’est en général pas possible. Le nombre de rendez-vous est également limité par le temps nécessaire pour chaque consultation. Dans la plupart des centres, le rendez-vous initial est de 60 minutes et le suivi de 30 minutes. Il est utile de faire une évaluation globale de la personne, de ses croyances, de son environnement professionnel et personnel pour bien prendre en charge des douleurs chroniques, mais cela prend du temps et donc limite le nombre de personnes que l’on peut voir. Lorsque l’on regarde le nombre d’équivalent temps plein de douleur en France, par rapport à la proportion de patients ayant des douleurs chroniques modérées à sévères, cela ferait une file active théorique de 21 000 patients par médecin. Evidemment ce n’est pas réaliste et le but des centres de la douleur n’est pas de prendre en charge l’ensemble des patients ayant une douleur chronique, seulement les cas les plus complexes.

 

Q5. Que pouvez-vous d'ailleurs nous dire sur la recherche dans la douleur ? Avez-vous de votre côté des objets de recherche de prédilection ?

 

Il y a des recherches sur la douleur assez nombreuses, et on connait maintenant bien mieux les mécanismes de la douleur. Par exemple, les voies neuronales impliquées dans les circuits de douleur ont été bien étudiées, et il a été mis en évidence que la plasticité neuronale pouvait être un facteur de douleurs chroniques. On parle de douleurs nociplastiques (en lien avec la plasticité neuronale). Cela est bien plus exact physiopathologiquement et bien moins stigmatisant que les anciennes douleurs « psychogènes ». Le site Retrain pain par exemple explique bien ces douleurs (https://www.retrainpain.org/francais ) Des avancées existent également dans les techniques invasives, par exemple la stimulation médullaire. Des médicaments prometteurs ont été évoqués (les anti NGF), mais pour l’instant en raison de certains effets secondaires, il est probable qu’ils ne puissent pas être disponibles prochainement. A titre personnel, je travaille beaucoup sur les lombalgies, les mécanismes de sensibilisation centrale ainsi que sur l’épidémiologie des douleurs chroniques.

 

Q6. Nous avons dans nos revendications la création d'urgences spécialisées pour la douleur. Que penseriez-vous de tels dispositifs?

 

Je comprends cette demande. J’imagine que la grande majorité des patients que je vois en consultation iraient dans ce type de structure, cela impliquerait d’avoir de nombreux professionnels de santé. De plus, une prise en charge en urgence serait-elle meilleure ? On pourrait arguer que diminuer le délai pourrait peut-être limiter le passage à la chronicité. A l’inverse, peut être que ce type de prise en charge impliquerait une prise en charge rapide, sans chercher à approfondir les réels problèmes (troubles psychologiques, croyances, vécu antérieur) et donc pourrait être contreproductif. De plus, puisque la majorité des prises en charges pour la douleur chronique sont non médicamenteuses, il faudrait lui associer les moyens de proposer ces prises en charge au long court. Je n’ai pas de réponse définitive à ce sujet, et ce type d’organisation pourrait bénéficier d’expérimentations.

 

Q7.  Pensez-vous qu'il y a chez les soignant-es hors CETD une "peur" des antalgiques notamment les morphiniques avec une sous prescription du fait d'un potentiel risque addictif ?

 

Oui indiscutablement, il y a une peur accrue du risque addictif, compte tenu de la forte médiatisation de la crise des opioïdes prescrits ou illicites qui a lieu aux USA (70 000 décès en 2020) et au canada (6300 décès). Néanmoins, la situation en France est très différente avec des décès beaucoup moins importants que outre-atlantique, même si ils existent. C’est une bonne idée de ne pas prescrire de morphine à une personne ayant une fibromyalgie puisque la prise au très long court et la majoration des doses peut amener au phénomène de tolérance et de dépendance. Néanmoins, il ne faut pas arriver à la situation inverse, que l’on voit fréquemment, par exemple avec un patient ayant des douleurs sur des métastases qui n’a pas accès à une antalgie correcte.

 

Q8. Vous président, que feriez-vous pour améliorer la prise en charge de la douleur en France en 2022 ?

 

J’aurai certainement une action en trois étapes :

1/ Réaliser un réel portail d’information sur de nombreuses pathologies chroniques (pas uniquement la douleur), ou chacun pourrait trouver une information scientifique de qualité. Par exemple j’ai coordonné les recommandations de la HAS sur la lombalgie, et le document final est une bonne synthèse. Mais il n’est destiné qu’aux médecins. Il y a le site de AMELI, mais qui est loin d’être pratique et est peu médiatisé , il est difficile d’y retrouver ce que l’on souhaite.

 

2/ Je ferai une synthèse de l’ensemble des prises en charge non médicamenteuses en expliquant ce qui est scientifique ou ne l’est pas (preuve d’efficacité, rationnel). L’ordre des médecins n’a jamais réalisé cela, alors que l’ordre des kinésithérapeutes a réalisé un très bon document éclairant le concept de « thérapies illusoires » (https://www.ordremk.fr/je-suis-kinesitherapeute/techniques-illusoires/ ). Les patients pour l’instant sont souvent perdus dans les « médecins alternatives et complémentaires », comme l’illustrent les débats récents autour de certaines techniques.

 

3/ Je favoriserai le recours aux techniques non médicamenteuses avec une base scientifique sérieuse, avec un accès comme ce qui s’est mis en place récemment avec les psychologues. A l’inverse, j’interdirais aux médecins de réaliser des consultations remboursées utilisant des techniques dont de nombreuses preuves ont montré leur inefficacité.

Interview sur les douleurs chroniques, de Dr Manon, malade chronique

Interview sur les douleurs chroniques, de Dr Manon, malade chronique

 

Dr Manon, @manonpatiente, malade chronique et blogueuse sur le site http://www.alorscommentcava.com/

 

Q1. On sait le parcours de soins difficile pour les patient-es qui ont des douleurs chroniques. Les médecins, selon votre expérience, sont-ils suffisamment ouvert-es ou formé-es sur ces problématiques ?

 

D’après mon expérience, les médecins en général ne sont pas assez formés aux problématiques douleurs. Par exemple, je n’ai pas été “envoyée” au centre douleur, j’ai trouvé moi-même, en fouillant sur internet, l’existence de ces centres. Quand mes douleurs très intenses sont apparues, après avoir éliminé des causes aiguës, les médecins ont continué à me prescrire du paracétamol codéiné en me disant “bon si vous en avez besoin alors on continue”. On sentait bien qu’ils étaient embêtés de poursuivre ces prescriptions, qui d’ailleurs me soulageaient de manière très insuffisante. Je ne savais pas qu’il existait d’autres molécules. Aussi un jour, un clinicien m’a dit « le problème du centre douleur c’est qu’une fois que vous y entrez, vous êtes perdu pour la médecine, on ne cherche plus pourquoi vous avez mal ». C’est tout à fait faux. On peut parfaitement être soulagé/partiellement soulagé par le centre anti douleur, et continuer les investigations. Parfois la découverte de la cause permet d’arrêter le suivi au centre douleur, parfois les deux se complètent, notamment si la maladie se soigne mal et/ou qu’elle a une composante douleur forte.
 

 

Q2. Que pensez-vous des Centres d'Évaluation et de Traitement de la Douleur ainsi que des prises en charge qu'ils proposent ?


J’en ai connu personnellement 3. Je trouve qu’ils sont très bien, indispensables même. Mais ils manquent de moyens, notamment de médecins. Les délais de rendez-vous sont beaucoup trop longs, notamment à l’échelle de la douleur (c’est incroyable d’attendre 6 mois un rdv pour une douleur qui vous empêche de bouger par exemple). Ils manquent aussi de professionnels hors médecins. Des secrétaires pour envoyer des courriers, notamment les renouvellements des ordonnances sécurisées (oui cela semble « tout bête »), des psychologues et des psychiatres. Un seul centre parmi mes trois avait un psychiatre, que l’on pouvait voir une fois tous les 6 mois (il valait mieux ne pas aller trop mal donc). Néanmoins, ce psychiatre était essentiel, car il savait voir « la souffrance mentale » par le prisme de la douleur. Un psychiatre « normal » ne comprend pas en général que la douleur puisse « rendre fou ». Une fois, j’ai demandé à être suivie par une psychologue du centre. On m’a renvoyée vers « la ville », faute de moyens. C’est très problématique car justement « la ville » est souvent lucide sur le fait que les cas douloureux hospitaliers doivent être pris en charge par des psychologues habitués à travailler avec des maladies à impact lourd, donc des hospitaliers a priori. J’ai beaucoup aimé aussi l’existence de « psycho-sociologues » dans un centre, qui étaient en fait des esthéticiens. Les médecins algologues disaient « on a moins mal si on se sent beau », c’est assez vrai. Enfin, j’ai parfois été déroutée par des pratiques qui devraient être proposées au cas par cas et non imposées ni systématisées : la musicothérapie ou la sophrologie. En soi, je n’ai rien contre, voire même cela peut être très bien, mais il ne faut pas laisser ces pratiques seules se substituer aux médicaments. Ni avoir à entendre de la bouche du soignant « à partir de maintenant, vous n’avez plus mal ». C’est d’une part énervant et désespérant pour le malade, et cela relève objectivement du charlatanisme anti-déontologique.

 

Q3. Quelles sont les difficultés pour un-e patient-e ayant des douleurs chroniques à consulter un nouveau médecin ?


Je pense que c’est surtout une difficulté si on prend des traitements « forts » : on peut être vite perçu comme « douillet », ou « drogué », ou « fou ». Aussi, c’est difficile de comprendre qu’un problème « continue », est toujours là et parfois toujours aussi intense, qu’il n’y a pas vraiment de solution et que donc la douleur persiste. On entend parfois « il a fini par s’habituer à la douleur ». C’est faux on ne s’habitue jamais. En général, c’est plutôt que la douleur a diminué grâce aux différentes stratégies mises en place.
Un autre problème se pose pour les nouveaux diagnostics. On peut prendre l’exemple tout simple de la traumatologie « vous arrivez à marcher alors la hanche n’est pas cassée ». Si on est sous morphine en continu par exemple, les choses ne sont pas si simples.

A l’inverse, souvent les gens pensent que sous morphine en continu « on ne sent plus son corps », et que donc un nouveau problème douloureux n’a pas forcément besoin d’être traité. C’est faux.

Au final, devant chaque nouveau médecin, on a l’impression qu’il faut toujours agiter une sorte de drapeau « attention, ne réfléchissez pas comme d’habitude pour poser un diagnostic, car mes seuils de douleur sont abaissés par les traitements. Croyez mon ressenti et aidez-moi en conséquence s’il-vous-plaît ».

 

Q4. On parle souvent de la mauvaise gestion de la douleur dans les services d'urgence. Qu'en pensez-vous ? Seriez-vous favorable à la création d'urgences dédiées à la douleur comme cela existe déjà notamment pour les céphalées ?

 

Pour ma part, ma douleur a toujours été très bien prise en compte dans les services d’urgence. C’est-à-dire qu’on m’a presque toujours je pense, demandé si j’avais mal  La chose que je regrette est que - comme souvent - on administre au patient une molécule avant de lui demander son avis, avant d’avoir demandé s’il avait déjà bien/mal toléré cette molécule, avant d’avoir demandé s’il prenait un traitement au long cours contre la douleur (souvent aux urgences, les multiples interlocuteurs ne facilitent pas la transmission des informations). ). Aussi, administrer du Perfalgan ou du Spasfon à quelqu’un qui est sous morphinique en continu, n’est probablement pas très pertinent, voire complètement inutile. Encore une fois, il manque du temps de soin pour pouvoir échanger avec le patient, consulter son dossier, etc ; parfois on a l’impression que la solution Perfalgan c’est la facilité pour se dire que la douleur a été prise en compte.
Des urgences dédiées c’est toujours très bien, mais ce qu’il faut avant tout c’est une uniformisation de la prise en charge sur tout le territoire. Ce n’est pas acceptable de souffrir moins à Paris qu’à Pernay sous prétexte qu’on se trouve dans la capitale. Tous les médecins du territoire doivent être également formés à la douleur et aux multiples façons de la traiter, connaître les multiples molécules et protocoles disponibles.

 

Q5. Quels sont les impacts des restrictions de prescription à 28 jours ou des ordonnances non renouvelables dans la douleur ? Y a t-il un renoncement aux soins liés à ces mesures ou bien cela ajoute-t-il au fardeau d'une maladie chronique ?


Le problème des 28 jours est une catastrophe. Il faut placer des notes dans son agenda, prévoir les rendez-vous médicaux à l’avance en conséquence (alors que c’est dommage d’utiliser du temps médical pour des raisons administratives), se rendre à la pharmacie à des dates précises (ce qui n’est pas toujours possible selon son état). Ce n’est pas possible d’avoir une « petite réserve » en cas de rupture du fournisseur. Et franchement, dans le cadre de la douleur chronique, cela n’a aucun sens. On n’arrête pas d’avoir mal après 28 jours. Cela me fait penser aux décisions de la MDPH valables 2 ans alors que la maladie est incurable. Au final, pour moi et mes médecins, cela rajoute un réel fardeau. Je ne renonce pas aux soins car j’ai trop mal et que j’ai des aidants, une pharmacie proche, mais je peux tout à fait imaginer une situation de renoncement aux soins malgré soi et donc potentiellement une catastrophe clinique si la douleur s’envole chez un patient isolé, sans solution de soulagement.

 

Q6. Avez-vous l'impression qu'il y a suffisamment de recherche sur les problématiques liées à la douleur? Avez-vous l'impression de façon plus générale que la question de la douleur est assez importante dans le système de santé ?


Non pas du tout. On est depuis des années sur le système des morphiniques globalement, et c’est tout. Il faudrait vraiment beaucoup plus de moyens pour la recherche (comme d’habitude…). Et il faudrait aussi que l’on s’intéresse beaucoup plus aux publications du domaine car il y en a quand même. Par exemple, on pense bien trop peu aux anti-NMDA ou aux solutions en préparation magistrale de type crème. Ce ne sont vraiment que deux exemples.
Sinon je trouve que globalement, dans le système de santé, la question de la douleur est assez bien rentrée dans les mœurs. C’est-à-dire qu’on nous demande souvent « vous avez mal ? » parfois au détriment d’autres préoccupations éventuellement plus importantes (c’est-à-dire qu’on peut avoir tendance à se dire que si on a demandé au patient s’il a mal, on a bien fait son travail, alors que le soin, y compris de la douleur, ne se limite pas à ça). 

 

Q7. Avez-vous l'impression que les soignant-es ont une crainte à la prescription d'antalgiques assez puissants pour obtenir l'antalgie du fait du risque addictif supposé de ceux-ci ? Si oui, est-ce que cette "crainte" vous paraît fréquente ?

 

Oh que OUI. Ce phénomène est absolument insupportable et même dangereux (ne pas traiter un douloureux peut mener « tout simplement » au suicide de ce dernier s’il souffre trop).
La diabétique n’est-il pas addict à l’insuline ?
L’insuffisant surrénalien n’est-il pas addict à l’hydrocortisone ?
Le malade de polyarthrite n’est-il pas addict à son anti-inflammatoire ?

De la même façon, le malade de la douleur a besoin du médicament qui correspond à son degré de souffrance. S’il est nécessaire que ce soit de la morphine, alors c’est comme ça un point c’est tout. Il faut naturellement rester vigilant à ce qu’on appelle la perte d’efficacité, qui entraîne souvent l’augmentation des doses et donc l’accoutumance. Pour lutter contre cela, on sait qu’il est pertinent et efficace de faire des rotations thérapeutiques. On peut parfois même revenir sur une molécule déjà prise par le passé. Aussi, le besoin d’augmentation des doses n’est pas du tout le cas chez tous. Enfin, pour les douleurs « semi-chroniques », c’est-à-dire qui durent longtemps mais qui finissent pas s’arrêter, on peut tout à fait mettre en place en système de décroissance progressive avec un accompagnement médical si besoin, comme c’est le cas par exemple de la cortisone ou de certains antiépileptiques comme la gabapentine.

 

Q8. Vous présidente, que feriez-vous pour améliorer la prise en charge de la douleur en France en 2022 ?

 

Je n’ai jamais été très bonne pour la politique mais je tente quelques propositions :

-des services douleur dans chaque centre hospitalier

-des délais de rdv dans ces services n’excédant pas 1 semaine

-des durées de rdv dans ces services d’au minimum 1h (potentiellement davantage la première fois, puis davantage une fois par an pour refaire un bilan général)
-des psychiatres et des psychologues dans ces services, formés et à disposition des patients afin que chaque personne qui en a besoin puisse se voir proposer un suivi

-des « médecines douces » pour ceux qui le souhaitent, mais encadrées, pour éviter les « dérives »

-la suppression des limites des ordonnances à 28 jours quand le traitement est établi depuis plusieurs mois et que le patient comprend les risques éventuels des surdosages (comme pour toute molécule)

-l’obligation pour le pharmacien d’avoir toujours 1 mois d’avance sur toutes les molécules antalgiques de sa patientèle afin d’anticiper toute rupture

-une campagne massive d’informations sur l’utilité des antalgiques en même temps que les campagnes déjà en action sur leur dangerosité

-un investissement majeur dans la recherche sur de nouvelles molécules antalgiques

-l’élargissement massif des AMM d’un grand nombre de molécules

-probablement bien d’autres choses auxquelles je ne pense pas…

 

Une 4ème année, en particulier dans les zones dites “sous-denses”, n'est pas souhaitable.

Une 4ème année, en particulier dans les zones dites “sous-denses”, n'est pas souhaitable.

 

I. Cet allongement du cursus nous paraît-il souhaitable pour les internes?

 

Non, cette mesure ne nous paraît pas souhaitable pour plusieurs raisons.

 

  1. Une promesse d’une meilleure formation qui ne nous convainc pas

 

Nous entendons souvent l’argument que cela améliorerait la formation, parfois sans préciser en quoi, ou en avançant la nécessité d’un temps d’apprentissage spécifique à la gestion du cabinet. Or, il ne faut probablement pas un an d’apprentissage pour cela. De plus, stage signifie apprentissage et donc encadrement. Or, la qualité de la formation donnée dans les stages ambulatoires est très difficile à quantifier et dépend du maître de stage. Sur ce critère, on ne peut dire si cela améliorera la formation ou pas.

De plus, selon les témoignages d'internes, l'expérience montre qu'une bonne partie des internes sont laissés seuls, en autonomie totale, non encadrés, voire même, sont poussés à voir un nombre de patient-es trop important pour un suivi et une formation correcte.

Par ailleurs, il sera probablement nécessaire, au vu du peu de terrains de stage, que le choix de stage se fasse sur la France entière. Les internes vont alors être, pour beaucoup, coupés de leur faculté de rattachement, donc des cours prodigués, ce qui signifie une perte dans la qualité de la formation.

 

  1. Quels impacts sur les internes?

 

Pour ce qui est des projets de vie, les internes arrivant en fin de cursus ont autour de 30 ans. Un âge où les questions du lieu d’habitation au long terme, voire de fonder une famille ont déjà commencé à trouver des réponses. Si, comme nous le craignons, le manque de maîtres de stages pousse à ce que les internes de 4ème année soient répartis en France entière, cela va créer une cassure dans ces projets.

Il y a donc un grand risque que ce soit une année loin de leur famille, modifiant les projets en vie, mais surtout ayant un impact majeur sur leur santé mentale. Or tout au long des études en médecine, la santé mentale des étudiants est désastreuse. Une enquête de 2021 sur la santé mentale des étudiants en médecine montrait que 75% des étudiant-es étaient atteints de troubles anxieux, 39% de symptômes dépressifs, 25% d'épisodes dépressifs caractérisés. Des chiffres en augmentation par rapport à 2017.

Les impacts sur les internes nous paraissent donc négatifs!

 

  1. Quid de l’attractivité du cursus?

 

La médecine générale est une spécialité qui a peiné à recruter autant qu’elle pouvait, puisque jusqu’à 2019 il n’y avait pas autant de recrutements que de places disponibles.

Et ce, probablement plus du fait d’un désintérêt de l'hôpital (renforcé par l’arrivée du COVID-19), ainsi que le fait d’avoir un internat plus court par rapport aux autres spécialités, plutôt que d’une amélioration de la formation en médecine générale elle-même.

À long terme, remplir toutes les places du cursus est primordial mais cela ne sera possible qu’en gardant une attractivité en comparaison des autres formations.

 

  1. Des étudiant-es ayant déjà entendu des promesses

 

Si cette 4ème année se concrétise, les premières promotions à en être atteintes seront aussi les promotions s’étant vu promettre des réformes sensées améliorer l’apprentissage, comme la R2C qui a promis un livre de cours unique et non contradictoire et un système de classification dans l’importance des connaissances. Livre qui ne verra jamais le jour, maintenant des contradictions dans nos cours, et des classifications qui se contredisent elles-mêmes et souvent dans le même livre de cours.

Ces étudiant-es ne verront cette réforme que comme quelque chose de similaire : des promesses qui n’ont aucune chance d’être tenues. Des étudiant-es qui vont se détourner de la filière de médecine générale.

 

  1. Les internes ne sont pas des variables d’ajustement

 

Nous voyons cette mesure, comme de nombreux syndicats d’étudiant-es, comme un moyen d’utiliser une main d'œuvre pas chère plus longtemps, d’utiliser les internes comme des travailleur-ses au service de l'État en oubliant ce qu’iels sont avant tout : des étudiant-es.

Si la volonté est réellement de mieux former les étudiant-es, il faut avant de lancer une proposition de loi montrer en quoi une 4ème année serait une plus value à la formation. Si un jour, il nous est montré un projet construit et cohérent de 4ème année, la discussion sera ouverte. En l’état, nous voyons cette 4ème année comme une manœuvre politique n’ayant pas pris le temps d’une réflexion suffisante, ni pris le temps de la construction avec les principaux intéressés.

 

 

II. Une 4ème année se réalisant en “zone sous dense

 

 

  1. Peut-elle améliorer l’offre de soin?

 

Elle ne le peut pas, et ce, sur plusieurs points. Tout d’abord, en ce qui concerne le suivi des patient-es.

En effet, l’idée étant de permettre à de nouveaux patient-es d’avoir accès à un médecin, et en particulier un médecin traitant, on pourrait observer une augmentation de la patientèle du maître de stage. Or, une grande partie de ses nouveaux patient-es ne seront probablement pas vus par lui-même mais par l’interne en “autonomie”. Ainsi, ces patients connus uniquement des internes devront rencontrer tous les 6 mois à un an un nouveau soignant, ce qui signifie devoir revenir sur son historique, recréer encore et encore une alliance thérapeutique, et donc, entraînant une rupture de suivi, sans que le maître de stage n’ait une vue d’ensemble. Nous risquons donc une rupture dans la continuité et la cohérence des soins. D’autant plus que des internes de 4ème année risquent d’être vus comme totalement autonomes, à la différence des internes 1ère et 2ème année.

Deuxièmement, il est nécessaire de trouver suffisamment de terrains de stage, puis de les pérenniser. En effet, si pour une quelconque raison le stage n’est plus proposé (départ à la retraite du maître, volonté de ne plus proposer son cabinet comme terrain de stage, autre raison annulant la convention avec la faculté…), nous nous retrouverions avec la patientèle excédentaire, ou la totalité dans le cas du départ à la retraite, qui serait de nouveau sans médecin.

S’il est possible de travailler sur la qualité du stage, nous ne pouvons rien faire face au départ à la retraite.

Et nous craignons qu’à terme, ces stages supplémentaires n’aient fait oublier la vraie raison du manque de médecins dans les zones sous-dotées, à savoir le manque d’attractivité des territoires, ce qui empêche ainsi d’y travailler pour y remédier.

 

  1. Les conditions pour la réalisation de ces stages ne sont pas remplies.

 

L'accueil des étudiant-es est quelque chose qui se réfléchit à l’avance pour les maîtres de stages, en particulier pour les internes de fin de cursus qui ont de besoin de matériel, dont notamment un cabinet où les internes seraient seuls pendant les consultations pour être réellement autonomes.

S’il faut augmenter les effectifs de maîtres de stages, tous-tes les praticien-nes ne sont pas capables aujourd’hui de fournir les besoins matériels suffisants pour accueillir les internes.

Il est illusoire de penser que l’on peut à la fois augmenter le nombre de terrains de stages pour répondre à l'arrivée des futures promotions avec un numérus clausus augmenté puis celles sans numérus clausus, et trouver encore d’autres terrains de stages pour une nouvelle année d’internat. En faisant cela, nous mettons à mal la formation des internes sur des années.

De plus, proposer en dernière année de s'intéresser aux zones en demandes de soignant-es est beaucoup trop tard : les projets de vie sont déjà très avancés à ce moment des études.

Il faut proposer des stages de qualité dès le 2ème cycle afin de créer un intérêt pour les étudiant-es plus tôt. Et ce, en prenant en compte les difficultés d’accès à ces zones.

 

  1. Quelles conditions d'accueil des internes?

 

Les facultés ont déjà des difficultés à trouver des terrains de stages pour les 2ème et 3ème cycles de médecine générale, puisqu’être maître de stage se fait sur la base du volontariat.

Pour renforcer les capacités d'accueil dans ces zones, il faut inciter les cabinets qui en sont capables à accueillir les étudiant-es. Et ce, en mobilisant les facultés qui doivent rechercher les maîtres de stages puis leur proposer un cadre pour les convaincre de rester. Mais aussi promouvoir à l’échelle des territoires (commune, département, région…) l'accueil des étudiant-es de 3ème et de 2ème cycle aux médecins, et particulièrement dans des zones sous-dotées. Ce d’autant que le nombre d’étudiant-es en médecine a, et va continuer d’augmenter.

Si une partie des nouveaux stages proposés sont dans des zones sous denses en soignant-es, non seulement ce ne sera pas de la coercition, mais en plus cela donnerait un contact aux étudiant-es avec certains territoires. Or il a été montré que le fait d’avoir exercé dans un territoire en tant qu’étudiant ou remplaçant est un facteur qui augmente les chances de s’y installer. Mais il faut cependant bien noter que cette augmentation a été étudiée avec des personnes choisissant d’aller dans ces territoires, et qu’un système où les étudiant-es se sentiraient forcées risque de créer de la réactance qui peut éloigner les nouveaux médecins plutôt que de les attirer.

Et comme dit plus haut, il va falloir d’une part trouver de nouveaux stages pour ces internes, mais il en faudra également pour pallier  l’augmentation du nombre d’étudiant-es due à la suppression du numérus clausus.

 

Conclusion

 

Nous sommes contre cette 4ème année dont l’idée est lancée sans la réflexion nécessaire. Qui se présente comme une amélioration de la formation sans justifier en quoi. Qui se pare de cette amélioration de la formation pour utiliser des étudiant-es comme des variables d’ajustements. Qui risque de fragiliser la filière de médecine générale. Qui risque de faire du mal aux internes. Et qui n’apporte même pas une offre de soin décente aux patient-es.

S’il est en effet nécessaire de proposer à toustes les patient-es des soins de qualité, ce n’est pas en imposant une année en “zones sous-dotées” que la solution sera trouvée. Il faut que des contacts non coercitifs soient créés entre de jeunes étudiant-es et ces territoires pour que l’envie de s’y installer soit pensée au plus tôt.

 

Pour rappel, vous pouvez retrouver nos propositions ici http://www.snjmg.org/blog/post/nos-10-mesures/1881 et concernant plus particulièrement les "déserts médicaux" http://www.snjmg.org/blog/post/deserts-medicaux-et-acces-aux-soins/1891

 

 

Douleurs chroniques : caractéristiques, conséquences, prise en charge et ses limites

Douleurs chroniques : caractéristiques, conséquences, prise en charge et ses limites.

Nous vous proposons de développer le sujet des douleurs et en particulier des douleurs chroniques à travers ce dossier dédié. Les douleurs chroniques touchent de nombreuses personnes et ont des conséquences majeures au quotidien. Or, cette thématique est trop peu évoquée.

 

Déjà qu'est ce qu'on appelle douleur(s) ? 

 

La douleur est définie comme une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée ou ressemblant à celle associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle.

 

On estime qu'un quart de la population mondiale souffre de douleurs.

Les femmes sont statistiquement plus touchées que les hommes avec 37% de femmes douloureuses contre 28% pour les hommes. 

Une explication de ce phénomène se situe dans le fait que le système hormonal féminin est dominé par les œstrogènes et la progestérone qui défendent moins bien face à la douleur que la testostérone qui domine le système hormonal masculin. 

 

Quelle est la différence entre une douleur aiguë et une douleur chronique ? 

 

Une douleur est dite aigue si elle dure moins de  3 mois alors qu'elle sera considérée comme chronique au delà de  3 mois. 

Les mécanismes et conséquences de ces deux types de douleur sont fondamentalement différents. 

 

La douleur aiguë est un signal d'alerte, signe qu'une autre  pathologie est sans doute en train de s'exprimer. Il convient donc de chercher et traiter la cause pour enrayer la douleur. 

 

Les douleurs chroniques sont des douleurs perdurant malgré le traitement de la cause sous jacente ou bien lorsque la cause sous-jacente ne peut pas être traitée. Il y a alors un dérèglement du circuit de la douleur avec des alternances entre des phases dites de pallier (où la douleur est en "fond continu") et des phases d'acutisation où la douleur est beaucoup plus forte sur une période généralement plus courte. 

 

L'une comme l'autre de ces 2 phases ont des conséquences majeures sur le quotidien et à long terme et entrainent un handicap. 

 

 Qu'est-ce que ça représente au quotidien de vivre avec des douleurs chroniques ? 

 

 D'un point de vue familial ou social,  la douleur contraint régulièrement à renoncer à des évènements positifs de vie, aussi bien les vacances, partager des sorties ou moments entre ami-es ou en famille. Ce renoncement à des évènements est malheureusement imprévisible et rend l'organisation difficile, on ne peut pas "prévoir" une crise douloureuse à tel ou tel moment. 

 Cela conduit à l'isolement et parfois à l'incompréhension des proches vis à vis de la condition de la personne malade. Cet isolement peut aussi être renforcé par une forme d'auto-protection envers les remarques ou rejet des proches qui conduit la personne malade à s'isoler d'elle-même préventivement pour éviter les remarques. 

 

D'un point de vue professionnel, il est parfois nécessaire de renoncer à  son ancien métier,  se reconvertir voire d'être en arrêt maladie prolongé ou en invalidité et de ne pas ou peu pouvoir exercer un quelconque métier ou des études. 

 

En conséquence directe de cet aspect professionnel, les difficultés sont aussi d'un point de vue financier avec une perte du revenu et de très faibles aides au handicap ou pension d'invalidité

Il est en effet nécessaire de devoir choisir entre les aides qui ne peuvent se cumuler qu'à hauteur de 900 euros maximum et ne les dépasseront donc que très rarement et

les dépenses financières pour le suivi médical avec parfois des dépassements d'honoraires ou des soins non remboursés (traitements médicamenteux, séances de suivi psychologiques, matériel médical).

 

D'un point de vue psychologique, les douleurs peuvent entraîner des troubles anxieux ou des troubles dépressifs. Ceci a un effet vicieux majeur car la dépression ou l'anxiété vont également augmenter le niveau de douleurs.

 

Quelles sont les difficultés dans la prise en charge de la douleur ? 

 

Biais d'évaluation de la douleur 

L'évaluation de la douleur est sujette à de nombreux biais. 

Pour commencer, il existe de nombreuses échelles d'évaluation de la douleur. Certaines sont une "notation" de la douleur par les patient-es de façon visuelle ou orale. On a également des évaluations selon des signes physiques (position, grimaces, etc). Certaines cherchent enfin à caractériser le type de douleur (brûlure, déchirure, arrachement, etc). 

 

La première source de biais est une minimisation du côté des  patient-es: il est en effet bien difficile de se représenter ce qu'est une douleur "insupportable" si on ne l'a jamais expérimenté, chaque référentiel est individuel, nous n'avons pas tous les mêmes douleurs "maximales" ressenties. De plus, la peur du jugement pousse souvent à ne pas noter la note telle qu'on la ressent réellement par peur de la stigmatisation et d'être jugé "fragile" ou "douillet-te"

 

La deuxième source de biais peut survenir côté soignant-es qui ont tendance à diminuer l'intensité déclarée par les patient-es si ceux-ci n'ont pas l'air de "souffrir assez". Il n'est pas rare qu'un-e patient-e quantifie sa douleur à 10 et que celle ci soit rabaissée "il n'a pas une tête à avoir une douleur à 10 c'est un 6 ou 7".*

 

Ceci est encore aggravé pour certain-es patient-es qui sont catalogué-es du fait du biais raciste que constitue le "syndrome méditerranéen" selon lequel les patient-es provenant du bassin méditerranéen auraient tendance à en rajouter (ce qui bien entendu est entièrement faux). 

 

Possibilités limitées en terme d'antalgie 

 

Les antalgiques sont en nombre limité. De nombreuses "marques" existent et de nombreuses associations mais ce sont souvent les mêmes molécules de départ à savoir le paracétamol, les anti-inflammatoires, le nefopam, le tramadol, la codéine et les dérivés morphiniques. 

 

De nombreux-ses patient-es présentent des intolérances au tramadol, à la codéine voire aux deux. 

Les morphiniques et leurs dérivés ont aussi leurs profils de tolérance assez limités. 

Les anti-inflammatoires ne sont pas adaptés à toustes et il existe des contre-indications (notamment digestives ou rénales pour les plus connues). 

On se retrouve donc rapidement avec peu d'alternatives au paracétamol qui convient le plus souvent seulement pour les douleurs légères à modérées. 

 

Il existe enfin des antalgiques atypiques comme les anti-neuropathiques (qui sont utilisés dans les maladies touchant les nerfs) ou encore les patchs de lidocaïne ou les dérivés du piment mais ceux-ci sont de prescription hospitalière voire de Centre d'Evaluation et de Traitement de la Douleur (ou CETD) donc difficile d'accès.

 

Des techniques non médicamenteuses existent également comme la rééducation, les stimulations électriques, les techniques manuelles eux aussi souvent gérées par les CETD. 

 

Les CETD sont, quant à eux, trop rares, ce qui rend les délais pour y consulter extrêmement longs. 

Les patient-es présentant des douleurs chroniques se retrouvent donc rapidement devant une impasse thérapeutique. 

 

Insuffisance de formation des soignant-es et fausses croyances 

 

L'enseignement de la gestion, l'évaluation et le traitement de la douleur auprès des soignant-es est au mieux lapidaire, au pire inexistant.

Les solutions apportées par les soignant-es sont donc parfois inappropriées par méconnaissance de tous les champs des possibles.           

 

Les douleurs sont malheureusement souvent trop peu prises en compte par certain-es soignant-es. Quant aux conséquences au quotidien des douleurs, elles sont encore plus méconnues des soignant-es. 

 

Il existe également une stigmatisation des patient-es qui vivent avec des douleurs chroniques. Ces patient-es sont souvent moins écouté-es, ou accusé-es de "simuler" ou d'aggraver leurs douleurs. Ces phénomènes sont d'autant plus importants pour les femmes. 

 

Ces patient-es peuvent aussi être victimes de stigmatisation du fait de leur consommation de médicaments. Iels sont vu-es comme des "junkies" ou des "accros" aux médicaments. Les soignant-es et les institutions sanitaires cherchent à en faire des prescriptions les plus courtes possibles afin de limiter au maximum le risque de mésusage ou d'addiction ce qui rend le quotidien des patient-es douloureux-ses chroniques encore plus lourd en terme de charge administrative. 

 

 

Nos propositions pour faire changer les choses 

 

- Améliorer la formation des soignant-es concernant les différentes thérapeutiques aussi bien médicamenteuses que non médicamenteuses mais également sur les ressources disponibles et les moyens de les mettre en œuvre.

- Sensibiliser les soignant-es sur les fausses idées reçues concernant la douleur (risque addictif, syndrome méditerranéen, comportements toxicophobes etc) et mettre la prise en charge de la douleur bien plus au centre des prises en charge. Avoir mal représente un problème en soi et doit être traité avec les médicaments nécessaires sans minimisation de celle ci et ou de ses impacts.

- Augmenter de manière conséquente les projets et budgets de recherche dans le domaine de la douleur afin d'apporter des innovations thérapeutiques aux patient-es présentant des douleurs chroniques. 

- Oeuvrer pour la création de plus de CETD, lutter contre l'idée que ces centres ne sont "pas rentables" et sensibiliser les soignant-es, administratif-ves et gouvernants à l'aspect primordial de la prise en charge de la douleur 

- dans ces centres, importance de la prise en charge globale et des conséquences de ces douleurs : ne pas négliger les antalgiques classiques, mais aussi proposer de manière plus générale les techniques comme la rTMS ou la tDCS. Avoir plus de moyens pour recruter des psychologue/psychiatres specialise-es en douleur.

- Augmenter le nombre de postes de médecins de la douleur, par conséquent augmentation du nombre de places en DU/FST douleurs. 

-Créer des urgences douleurs sur le modèle de celles existant pour les céphalées 

- limiter les obstacles à l'obtention des antalgiques notamment de palier II et III, via une meilleure formation des pharmacien-nes, et via l'allongement des ordonnances pour les patient-es avec traitement au long cours.

- élargir la prescription de TENS à d'autres médecins (spécialistes ou généralistes) que les médecins de la douleur. 

 

 

Covid, fatigue de la pandémie, "vivre avec" le virus : vers quelle société ?

Covid, fatigue de la pandémie, "vivre avec" le virus : vers quelle société ?

Alors que les gouvernements de nombreux pays occidentaux n'ont jamais vraiment mené de politique de santé publique digne de ce nom vis à vis du covid, émerge depuis quelques temps maintenant toute une rhétorique autour du "vivre avec" le virus. L'idée partant du fait que le virus est là pour longtemps et qu'il faudrait donc apprendre à "vivre avec" et s'adapter. Sur le papier pourquoi pas. Effectivement, le virus semble encore là pour un moment. Mais les versions de ce "vivre avec" qui sont mises en avant ne sont pas des politiques de santé publique. Elles consistent en un abandon pur et simple de toute mesure pour réduire les risques, de toute mesure pour diminuer les contaminations, elles consistent en la ségrégation des personnes malades/handicapées en ne leurs permettant plus l'accès à l'espace public sans risque pour leur santé. Comme le dit Dr Tedros (Directeur Général de l'Organisation Mondiale de la Santé), ci dessous nous sommes peut être lassé du virus, mais lui n'est pas lassé de nous :

"We’re all tired of this virus, and tired of the pandemic. But the virus is not tired of us. Omicron remains the dominant variant, with the BA.5 sub-variant representing more than 90% of sequences shared in the last month" (1)

Toutes les tentatives des "rassuristes" tels que sont appelés les différents "camps" aujourd'hui visant à rassurer sur la gravité du virus, nier le covid long, nier les séquelles sur les malades chroniques ne sont pas, à notre sens, de bonnes mesures en terme de politique de santé.

"Vivre avec le virus" sans prendre de mesures de réduction des contaminations, cela conduit à accepter sans rien y faire, les centaines de milliers de morts, les millions de malades du covid long, les centaines de milliers de malades/handicapé-es qui ont vu leurs états empirer… Nous sommes pleinement d'accord avec l'OMS sur ce point :

"There is a lot of talk about learning to live with the #COVID19 virus.

But we cannot live with 15,000 deaths a week. We cannot live with mounting hospitalizations and deaths.

We cannot live with inequitable access to vaccines and other tools" (2)

["Il y a beaucoup de parole sur le fait d'apprendre à vivre avec le virus du COVID-19. Mais nous ne pouvons vivre avec 15 000 décès par semaine. Nous ne pouvons vivre avec des montagnes d'hospitalisations et de décès. Nous ne pouvons vivre avec un accès inéquitable aux vaccins et aux autres outils"]

Vivre avec le covid cela devrait être ceci, comme le disait Antoine Flahaut sur Twitter(3), et non l'abandon de toute politique :

 

"Stratégie en 5 points:

1. Plan “Ventilation” national

2. Masque FFP2 en lieux clos dès que le virus circule au-dessus d’un seuil

3. Promotion des tests et isolement des positifs

4. Schéma vaccinal complet pour adultes et enfants

5. Médicaments efficaces pour les vulnérables"

Nous avons cruellement besoin d'une politique forte en matière de santé pour faire face à la pandémie. Nous appelons les pouvoirs publics à agir et à prendre les mesures qui s'imposent et non à accepter l'inacceptable.

 

Nous demandons donc :

- un accès simplifié aux médicaments prophylactiques et aux traitements. Dans ce cadre, pour que l'Europe se mobilise pour un accès à d'autres traitements que le Paxlovid, comme les anticorps monoclonaux (et notamment le bamlanivimab et l’etesevimab contre les variants actuels BA.4 et 5) auxquels nous n'avons pas accès ici (4)

- Un plan ventilation/qualité de l'air pour tous les lieux clos et en particulier les écoles et lycées qui ont été rouverts sans mesure et sans ce qui avait été annoncé en terme de qualité de l'air par Emmanuel Macron

 - Une réflexion sur des indicateurs fiables utilisables à la fois en santé publique et pour le suivi des patient-es. En effet le taux d'incidence n'est plus fiable devant le faible taux de dépistage effectué actuellement.

- La mise à disposition gratuite de ffp2 pour tous-tes.

- L'obligation du port du masque en lieux clos dès le passage d'un tel niveau dans les indicateurs mis en place

- Des financements pour la recherche plus importante notamment en direction d'un vaccin multi variants pour les coronavirus.

- La levée des brevets sur les vaccins afin de permettre un accès plus large aux vaccins dans le monde.

- Une politique de santé publique sur la vaccination par l'explication et la pédagogie et non la coercition sur le vaccin pour le covid mais aussi tous les vaccins au vue de l'apparition de maladies quasi disparues, mais qui réapparaissent devant des taux de vaccination trop faibles.

- La promotion du port du masque chirurgical à minima en lieux clos dès que des symptômes d'infection apparaissent, pour les maladies se transmettant via les postillons ou bien par l'air.

 

Sources

(1) https://twitter.com/WHO/status/1559897543781277699?t=XZDi5R-iGz9lolmDzGQ39 g&s=19

(2) https://twitter.com/WHO/status/1559897964054822912?t=Y4FE509Cwcb8Jxt9juRPA g&s=19

(3) https://twitter.com/FLAHAULT/status/1558389566066802689?t=u07Agk55i0zJ4rGj9r vsjA&s=19

(4) https://www.letemps.ch/sciences/un-traitement-efficace-contre-covid-severes-reser ve-aux-etatsunis

Malades chroniques : entre validisme, droits bafoués, obstacles administratifs et errance médicale

Malades chroniques : entre validisme, droits bafoués, obstacles administratifs et errance médicale

 

Les malades chroniques sont confrontés à divers obstacles au cours de leur parcours de santé. Il existe de nombreux enjeux, tels que le consentement, le libre choix éclairé, l’impact sur leur vie quotidienne, les obstacles administratifs, les problématiques financières, l’errance médicale et les différentes problématiques autour du suivi.

Vous trouverez ici cet article en PDF : https://discordapp.com/channels/755902622128406709/971309220517539871/1006903002680004768

 

I. Consentement et décisions sur sa propre santé 

 

1. Le consentement

 

Les droits des malades sont souvent bafoués au sein du système de soins où le-a patient-e est souvent  envoyé-e d'un service à l'autre sans même parfois que son consentement soit pris en compte dans la prise des RDV hospitaliers. Iel est simplement informé-e de l'endroit où iel doit se rendre qu'iel soit d'accord ou non.

 

Il en est de même pour les examens cliniques et paracliniques où les injonctions sont nombreuses "je vais vous examiner" "je vais vous prévoir tel examen" quand normalement les soins devraient être prodigués POUR et AVEC le-a patient-e et avec son accord explicite. 

 

Le consentement sur l'accès aux informations médicales est également souvent bafoué. On peut parler des problématiques des systèmes en réseau (on pense notamment à Orbis à l'AP HP) qui vont révéler automatiquement votre "pedigree" sur plusieurs années. De même, des inquiétudes ont été soulevées à juste titre sur la centralisation via Mon Espace Santé. En effet il existe des options pour masquer certains documents ou au contraire les afficher à toustes mais encore faut-il qu'elles soient connues des patient-es mais aussi surtout des soignant-es qui devront intégrer ces données au dossier UNIQUEMENT avec le consentement des patient-es et en leur demandant expressément s'iels souhaitent un accès partiel ou total. 

Une autre inquiétude concernant Mon Espace Santé concerne les contrôles des accès au dossier, quand on sait que déjà des patient-es se retrouvent avec une déclaration d'un nouveau médecin traitant sans leur accord alors que celui-ci est censé être obligatoire à toute déclaration. 

De nombreux-ses patient-es ont alerté sur les problèmes que pose Mon espace santé, notamment pour les personnes trans, psychiatrisées, les malades chroniques. Nous vous renvoyons à cet article de XY media sur le sujet : https://www.xymedia.fr/les-dangers-du-service-mon-espace-sante-pour-les-personnes-trans/

 

2. Informations, décisions partagées, choix du praticien

 

Les patient-es constatent souvent un manque profond d'information délivrée concernant leur propre santé. Infantilisé-es, jugé-es inaptes à comprendre car n'ayant pas "10 ans d'études" de médecine, les informations et décisions sur leur propre santé leur sont souvent mal délivrées voire deniées. Il est fondamental que la maladie ainsi que les traitements, et les conséquences de ceux ci soient expliqués, avec des explications intelligibles mais précises. Alors que le-a patient-e devrait être au centre de son parcours de soin, il n'en est souvent qu'un-e spectateur-rice qui ne peut que subir ou fuir.

De même, les examens complémentaires réalisés sont peu expliqués et les résultats doivent souvent être quémandés par les patient-es. 

 

De nombreux outils se sont développés ces dernières années sur la décision médicale partagée qui devrait, à notre sens, être la base de toute décision médicale. Ces outils existent, notamment, dans la prise en soins des problématiques liées au cholestérol ou bien au dépistage du cancer du sein par mammographie. 

Ces outils permettent d'estimer pour x personnes dépistées ou traitées combien tireront un bénéfice de l'intervention et combien auront des effets péjoratifs de cette intervention. 

On explique aux patient-es les risques liés à la pathologie, les risques liés au traitement, les risques liés aux examens de dépistage. Ensuite une fois toutes ces informations synthétisées, c'est le-a patient-e qui prend la décision finale en choisissant le risque lui paraissant le plus acceptable, chaque décision étant individuelle car le curseur d'acceptabilité du risque n'est pas le même chez toustes. Certain-es préfèreront vivre avec le risque de méconnaître un cancer jugé inoffensif car se développant très lentement quand d'autres voudront avoir l'information au plus tôt pour pouvoir anticiper les choses. 

 

Un autre frein à l'information et à la décision partagée est l'asymétrie relationnelle entre le soignant-e qui "saurait" et les patient-es qui ne sauraient pas et ne pourraient pas savoir. Le savoir expérientiel des patient-es est souvent méprisé par les soignant-es. Les patient-es ne peuvent, en effet, tout de même pas mieux savoir (avoir les mêmes  connaissances théoriques  que des soignant-es ayant fait x années d'études) mais iels ont d'autres savoirs, importants et à ne pas négliger. Or il est important de comprendre que les savoirs théoriques des soignant-es sont très différents et d'utilité différente à ceux des patient-es qui ont un vécu concret de leur maladie, en connaissent les tenants et aboutissants et le retentissement réel sur leur vie. Ils ont également souvent des tips, trucs et astuces pour aider au quotidien à supporter leurs symptômes qu'il est également important de connaître car ce sont des facilitateurs de vie. 

 

Enfin, se pose le problème du libre choix des soignant-es. En effet, les spécialisations et surspécialisations des soignant-es associées à l'intense désertification médicale font que les patient-es n'ont souvent qu'un choix limité de soignant-es s'offrant à eux pour une pathologie donnée ou même sur un territoire donné. 

En Ile de France notamment, où il est souvent déjà difficile de trouver un médecin traitant, il est encore plus difficile d'en changer si cela ne se passe pas bien avec ellui.

Il en est de même pour les spécialistes ce d'autant qu'on ajoute souvent une contrainte supplémentaire qui est celle de la sectorisation et donc des moyens financiers des patient-es. Un-e patient-e ne pouvant consulter qu'un praticien-ne en secteur 1 se verra offrir un choix encore plus limité. 

 

II. Vie quotidienne des malades et impact sur leur santé 

1. Le validisme dans le soin 

 

Le validisme est ominiprésent dans la vie des malades et handi-es. Invisible aux yeux des valides, il se situe pourtant PARTOUT et au quotidien. 

Pour prendre un exemple récent, la fin du port du masque dont semble se réjouir tant de valides est une exclusion de plus pour les malades et handi-es. Face aux "libérations" (on ne parle encore une fois que d'un carré de papier devant la bouche... et oserons-nous le nez !) progressives, les gens à risque ont donc du renoncer à leurs loisirs, sorties, puis à travailler en présentiel et enfin même à leurs déplacements sans prendre le risque non négligeable pour elleux de se contaminer et d'être potentiellement gravement malade. 

Cet exemple n'en est malheureusement qu'un parmi tant d'autres et le validisme ne se limite pas comme le veut l'esprit commun qu'à l'accessibilité PMR, même si rappelons le, celle ci est également très mal respectée.

 

2. Le coût très important de vivre avec une maladie chronique repose encore beaucoup sur les malades. 

 

Tout d'abord il existe les coûts les plus évidents que représentent les dépassements d'honoraires ou l'avance des frais de consultations quand le tiers payant n'est pas pratiqué, ce qui peut constituer un sérieux budget. 

On notera également que des médicaments  ou des aides à la mobilité sont peu remboursés par la Sécurité sociale. 

Enfin, les allocations ou pension d'invalidité sont très faibles  (sous le seuil de pauvreté) rendant celleux qui ne peuvent travailler à temps plein dans une situation de précarité qui se surajoute à toutes ces dépenses. 

Cela renforce fortement les inégalités sociales dans le soin. 

 

3. Être malade chronique, une survie contre l'administration

 

En cas de maladie chronique, obtenir quoi que ce soit pour se soigner ou vivre peut vite relever du parcours du combattant. 

Les problèmes administratifs sont nombreux et sans un conseil avisé d'assistant-es social-es spécialisées ou d'autres malades les situations sont souvent inextricables. 

Pour commencer, face à une maladie empêchant de travailler, 2 aides principales existent : l'allocation adulte handicapé si un handicap est lié à la maladie ou la pension d'invalidité. Selon différents critères (notamment le taux de handicap pour l'AAH ou les salaires précédents pour la pension d'invalidité), l'une ou l'autre sera plus ou moins "intéressante" (toutes proportions gardées puisqu'on reste sous le seuil de pauvreté) mais ne sont absolument pas cumulables. L'AAH peut "juste" compléter la pension d'invalidité si celle ci est inférieure à 900 euros jusqu'à atteindre 900 euros maximum.

Il faut donc bien se renseigner en amont, via des simulations, pour savoir laquelle des deux sera la plus rémunérante pour survivre. Il faut également avoir le temps nécessaire à remplir ces dossiers ainsi qu'un médecin disponible et compétent en la matière pour le compléter au mieux sur le versant médical. 

 Il y a également des entretiens qui sont menés où les malades doivent en quelque sorte "prouver" leur maladie et son retentissement avec des entretiens souvent réalisés à charge et pas toujours dans la bienveillance, au prétexte de limiter les "abus". On rappelle que la fraude sociale représente un montant négligeable et qu'il est ici question de personne ne pouvant plus/pas travailler et dont les ressources sont en deçà du seuil de pauvreté.

 

III. L'errance médicale et les problématiques spécifiques des malades chroniques

 

1. Errance médicale 

 

L'errance médicale est une problématique importante pour les malades notamment celleux présentant des maladies rares. On estime que le délai moyen entre le début des symptômes et un diagnostic de maladie rare est de 18 mois et pourra atteindre jusqu'à 5 ans pour environ 25% des patient-es. Ces délais extrêmement longs laissent les patient-es dans une incompréhension voire une détresse importante face à leurs symptômes inexpliqués. 

Cela peut aller jusqu'à entraîner un renoncement aux soins tant ceux-ci sont perçus comme ne pouvant rien apporter. 

Trouver un diagnostic, c'est mettre un nom sur la maladie qui affecte la personne, c'est aussi faire un pas vers une solution thérapeutique quand celle-ci existe, et également faciliter l'accès à des aides auprès de la MDPH.

Ces diagnostics sont d'autant plus difficiles à établir qu'il faut souvent faire appel à un centre de référence et que la simple connaissance des centres de référence est difficile à maîtriser et les délais de rendez vous  de ceux ci souvent très longs.

 

 

2. Malade chronique, malade "non rentable" 

 

Le système de paiement à l'acte rend les malades chroniques non rentables par essence. Les soins à apporter aux malades chroniques sont au long cours, un pari d'avenir pour une meilleure santé à terme quand la politique de santé va, via sa rémunération sur un mode "problème = solution immédiate" bien plus adapté aux maladies aiguës. 

En effet, les soins infirmiers chroniques sont très mal rémunérés quand ceux ponctuels le sont un peu plus. 

Il en est de même pour les consultations qui sont rémunérées au même prix quelque soit leur durée et favorise donc les actes plus courts que ceux chronophages d'une prise en soins globale et longue. 

Lors d'une hospitalisation, on se retrouve face au même problème, avec une augmentation de la durée moyenne de séjour (DMS) pour un malade chronique. Or on sait que plus une DMS est longue, moins l'hospitalisation est jugée rentable, ce qui pousse parfois à un tri des malades. 

On pourra aussi s'intéresser aux centre anti-douleurs qui sont peu nombreux dans les hôpitaux bien que surchargés de demandes et avec des délais pouvant dépasser 1 an. Ceux-ci sont considérés comme non rentables car les soins prodigués sont souvent coûteux, aussi bien du fait d'hospitalisations, de traitements (médicamenteux ou non médicamenteux coûteux) mais aussi de transports pour s'y rendre etc. 

Mais ces coûts évidents directs doivent être contrebalancés au niveau sociétal. Car au delà de l'aspect de soulagement pour la personne (qui est quand même l'essentiel des objectifs de soins), il y aura aussi potentiellement un moindre absentéisme au travail, une meilleure intégration dans la société, etc ce qui constitue des "économies" secondaires pour la société qui ne sont pas prises en compte du tout dans le calcul de la "rentabilité" d'un service. 

Bien entendu, on rappellera également qu'à nos yeux aucun soin n'a à être rentable et nous dénonçons évidemment cette logique. 

 

3. Le suivi des malades chroniques et ses problèmes

 

Les maladies chroniques bénéficient parfois d'un suivi pluridisciplinaire. 

Parfois celui-ci est centralisé au sein d'hôpitaux de jour spécialisés dans une pathologie qui coordonnent les soins. 

Mais le plus souvent ce suivi est morcelé entre chaque spécialiste qui soigne l'organe de sa spécialité, où la maladie dont il est spécialiste parmi les plusieurs autres présentées par les patient-es. 

On a donc un suivi par un à plusieurs spécialistes ainsi qu'un-e médecin généraliste,  un-e pharmacien, un ou des kinésithérapeutes, des orthophonistes, des ergothérapeutes, bref ça peut vite monter en nombre d'interlocuteur-rices.

Et parmi tous ces gens, la communication est au mieux via des courriers, arrivant plusieurs jours à semaines (oserons-nous mois...) après la consultation ou l'hospitalisation; rarement par téléphone, souvent uniquement en cas d'urgence. Sinon la communication est tout simplement absente et c'est aux patient-es de transmettre aux autres soignant-es les informations comprises en consultation (si tant est que ça lui ait été expliqué par ailleurs).

Le généraliste a souvent un rôle de centralisateur-rice des informations concernant les patient-es mais celleux-ci n'ont pas toujours l'envie ou la possibilité de se lancer là dedans, d'autant qu'iels n'ont pas toujours non plus tous les comptes-rendus à leur disposition, ceux ci étant envoyés entre médecins mais pas toujours aux patient-es, quand compte rendu il existe.

 

Au final, cette coordination revient, de fait, aux patient-es qui doivent organiser seul-es leur prise en soins et optimiser selon les préconisations de chacun qui sont parfois contradictoires. Le-a patient-e doit donc souvent évaluer par ellui même les balances bénéfices/risques, faire des recherches sur les traitements possibles, faire des recherches sur les spécialistes approprié-es à ses pathologies, organiser ses rendez vous et la cohérence de sa propre prise en charge.

 

En plus d'être malade, les patient-es ont à supporter la charge mentale de leurs soins. 

 

Il est urgent d'optimiser la coordination entre soignant-es pour les malades chroniques afin de faciliter leur prise en soins optimale, cesser les injonctions contradictoires et que chacun-e participe à cela. En effet la coordination des soins est de la responsabilité de toustes et pas seulement des patient-es ou des généralistes (comme bon nombre de choses qui incommodent d'ailleurs les spécialistes, comme les arrêts de travail ou les bons de transport d'ailleurs, mais c'est une autre histoire).

Une meilleure coordination des soins, un meilleur suivi global des malades chroniques entraînerait de meilleures prises en charge et bien moins de charge mentale sur les patient-es, qui ont déjà leurs maladies à gérer et dont ce n'est pas le travail. 

 

L’internat et ses problématiques

      

L’internat et ses problématiques

 

Quelques éléments définissant l’internat afin de sensibiliser à en quoi cela consiste ainsi que les problématiques qui lui sont spécifiques.

 

  1. Qu’est ce que l’internat

 

Les études de médecine sont divisées en 3 cycles : le premier cycle pour les trois premières années, le second cycle "l'externat", et enfin le troisième cycle qui est l'internat. Les internes sont des étudiant-es en 7e à 12e année. Iels ont déjà choisi leur spécialité après le concours de l'examen national classant. Iels ont un statut mixte, à la fois étudiant-es, là pour se former, apprendre leur métier, mais sont aussi des salarié-es puisque travaillent à l'hôpital en temps plein via des stages de 6 mois, tournant de service en service de façon semestrielle. De plus, iels assurent des gardes et astreintes obligatoires selon les services. 

 

2. En quoi c'est un problème alors ? 

 

L'internat est un statut compliqué en premier lieu du fait de l'absence de contrat de travail officiel : rien ne relie contractuellement l'interne et l'hôpital ni même l'interne et la faculté. 

Il est également parfois compliqué d'allier le statut étudiant-e et le statut salarié-e car les contraintes sont souvent différentes et parfois incompatibles.

 

Du point de vue des études, les cours sont plus ou moins nombreux selon les spécialités. Le plus compliqué est cependant de pouvoir y assister du fait des contraintes de stage notamment. Les internes ne sont en effet, pas toujours libéré-es de stage pour aller en cours, ou bien internes sont parfois obligé-es d'être en lendemain de garde pour assister à leur cours (avec les conséquences qu'on imagine sur leur attention à ce cours). Enfin, les formations en stage sont peu nombreuses, les médecins titulaires ne sont pas toujours suffisamment présent-es dans les services pour accompagner les internes dans les prises en soin des patient-es et pour leur enseigner.  

 

Du point de vue des services hospitaliers ou ambulatoires, les problèmes sont également nombreux. En premier lieu, les internes sont devenus indispensables, au fil des années, au fonctionnement hospitalier et ambulatoire du fait d'un important manque de personnel médical et paramédical. 

Il y a également la problématique du volume horaire des internes. En effet, la législation européenne fixe le volume hebdomadaire à 48h maximum ce qui n'est que trop rarement respecté en pratique. 

Les internes n'ont parfois pas le droit à leur repos compensateur (période de 11h sans aucune activité professionnelle faisant suite à une garde de 12 ou 24h) les obligeant parfois à enchaîner des heures de travail pouvant atteindre 36h d'affilé. 

 

Tout ceci mis bout à bout pose d'importants problèmes de sécurité des internes eux-mêmes mais aussi et surtout de sécurité des patient-es. Leur prise en soins n'est en effet pas optimale du fait d'insuffisance de formations théoriques mais aussi de conditions dangereuses de prises en soin. 

 

3. Et ailleurs ça se passe comment ? 

 

En Allemagne, la durée de travail hebdomadaire est en moyenne de 48h. Il existe une possibilité, si désirée, de travailler à temps partiel, en rallongeant d'autant que nécessaire la durée de l'internat. La validation se fait via une liste d'actes à valider (qui sont validés au fur et à mesure, stage par stage) et un nombre d'heures total. il existe une évaluation de fin d'année chaque année. L'encadrement est important au début mais l'autonomie arrive très vite.  

 

En Roumanie, la journée peut commencer très tôt mais elle se termine selon le rythme de chacun entre 15h et 16h. . Il n'y a pas d'évaluation systématique à chaque stage, on évalue une impression générale. En revanche, en fin d'internat il existe une évaluation de fin d'internat où un examen clinique complet doit être réalisé ainsi qu'une prise en soins réalisée seul devant un jury de la spécialité. 

 

En Irlande, l'internat est très long,  d'une durée de 8 ans. Tous les 2 à 3 ans, il y a un examen, permettant de gravir les échelons un par un, jusqu'à atteindre le rang de Docteur en fin d'internat. L'interne est attribué-e à une région où une grande mobilité est demandée avec des trajets pouvant atteindre 2h.