Nous, membres du CRAN et soignant.es du SNJMG, défendrons toujours l'accès pour toutes et tous à des soins de qualité

 

Nous souhaitons tous être accueillis de façon inconditionnelle et polie par nos soignants, nous souhaitons recevoir les soins optimaux adaptés à nos besoins. Pour certains, l'accès au soin est uniquement conditionné par des aspects pratiques : délai d'attente, distance, tiers-payant. Hélas, pour certaines catégories d'usagers, comme les personnes racisées, LGBT ou obèses, trouver un soignant qui ne les réduit pas à un stéréotype peut être compliqué

Il existe pléthore de témoignages de patients victimes d’humiliation lors de consultations médicales et qui se plaignent d’un traitement différencié dû à leur origine, leur sexe, leur corpulence ou leur orientation sexuelle. De nombreuses études documentent ces discriminations en France comme à l'étranger. Ainsi, l'étude Trajectoires & Origines retrouvait 3 fois plus de réponses positives à la question « Vous est-il déjà arrivé que du personnel médical ou un médecin vous traite moins bien que les autres ? » pour les personnes originaires d'Afrique sub-saharienne que pour la population « majoritaire ». Des situations encore plus dramatiques se produisent, comme ce fut le cas pour Naomie Musenga en Décembre 2017, décédée 5 heures après son premier appel au SAMU faute de soins. Les enregistrements ont montré comment les croyances de l'opératrice, en lien avec la construction raciste du "syndrome méditerranéen", ont influencé négativement sa capacité à délivrer des soins adaptés.

Qu’est-ce qui est le plus choquant : des praticiens racistes ou des patients qui cherchent à s'en prémunir ?

La mise en place de listes de soignants "sûrs", racisés ou alliés n'est qu'une tentative de réponse des usagers à ces problématiques. Ce n'est pas par plaisir :  cela limite le nombre de soignants disponibles et augmente le délai de consultation ou l'éloignement. Des annuaires de praticiens communautaires existent depuis des années, notamment pour permettre un accès sûr à l'IVG, à des soins adaptés à son orientation sexuelle ou sa situation administrative. Pourquoi les personnes noires ne pourraient-elles pas s'organiser ?

Les institutions ont été univoques dans la condamnation de ces listes mais elles ont été plus timides pour s'attaquer aux discriminations en santé au cours des dernières décennies. Il aurait été préférable que les Ordres fassent montre d’autant de virulence à défendre leur honneur qu'à lutter contre le racisme, l’islamophobie, l’afrophobie, la grossophobie, la LGBT-phobie dans leur profession. La Cour des Comptes dans son rapport du 9 décembre 2019 a dénoncé « des insuffisances persistantes au sein du CNOM quant à l’exercice de ses missions » et lui reproche des signalements non-traités, l’absence de poursuites disciplinaires et la partialité de certains jugements.

Certains, comme la LICRA, agitent l’épouvantail de « l’Apartheid médical : un soignant noir pour un patient noir ». Les usagers ont le droit, inscrit dans le code de santé publique, de choisir leur médecin.  Il s’agit d’un simple choix offert aux patients, valable seulement dans le cadre de la médecine privée et non dans le cadre de la médecine publique : nous sommes bien loin du séparatisme médical annoncé. Les médecins, eux, n'ont pas le droit de choisir leur patient. L'apartheid médical ce sont des médecins qui se permettent de choisir leurs patients ou pire, de leur prodiguer des soins inadaptés ou dangereux.

La relation de soin est une relation dissymétrique dans laquelle le soignant est en position d'autorité et où s'ajoutent des oppressions déjà présentes à l'extérieur du cabinet. L'éditorial de la revue Agone de 2012 établit ainsi que "Ces rapports de classe, de genre ou de race, qui organisent et structurent l'espace social, ne s'arrêtent pas aux portes des hôpitaux ou des cabinets médicaux". Il ne suffit pas de décréter que les soignants ne doivent pas être discriminants pour que les discriminations cessent. Refuser les patients bénéficiaires de la CMU-C et de l'AME est interdit aux médecins, depuis toujours. Pourtant, jusqu'à l'intervention du Défenseur des droits en 2018, les praticiens pouvaient librement afficher la mention "Pas de CMU" ou "Les AME ne sont pas acceptées" sur leur profil Doctolib. Un exemple de racisme structurel en médecine s'illustre par l'absence de représentation des lésions dermatologiques sur des peaux noires ou encore par la tolérance accordée à des enseignants tels que le Dr. FREYER à Lyon qui ponctue ses cours de propos racistes et sexistes dans l'indifférence générale.

Tant que la réalité et la gravité des discriminations en santé ne sera pas reconnue, nous ne pourrons pas avancer.

Il faut des formations spécifiques sur ces thématiques, pour tous les professionnels de santé, à chaque étape de leur formation ainsi que des dispositifs de signalement efficaces et accessibles. Le CRAN a rencontré le 9 septembre 2020, Patrick Bouet, président du CNOM qui s’est engagé à collaborer avec nous afin de lutter véritablement contre le racisme médical. Espérons qu'il s'agisse d'un premier pas dans la bonne direction.

 

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