Système de santé : la Cour des Comptes toujours victime de ses reflexes bureaucratiques

 
La Cour des Comptes a publié ce mercredi 29 novembre 2017 un rapport thématique sur l'avenir de l'assurance maladie. 
Comme à son habitude le rapport de la cour des comptes excelle par la quantité et la qualité des informations recueillies mais il pêche, une fois de plus, par une analyse et surtout des propositions dénotant une vision très administrative déconnectée des réalités du terrain.
Si le rapport déplore les nombreuses rigidités du système de santé, les sages proposent de priver la convention médicale de ses principaux moyens d'action pour les confier à l'Etat (modalités d'installation des libéraux, modalités de rémunération et régulation comptable) et suggèrent d'accorder davantage de pouvoirs aux agences régionales de santé (ARS).
Si le rapport décrit le fonctionnement en silos de notre système de soins, les sages ne proposent pas grand chose pour favoriser l'approche pluri professionnelle, la proposition de rémunération collégiale à "l'épisode de soins" relevant bien plus d'un objectif économique (puisque le rémunération se ferait à enveloppe fermée, quel que soient les actes et les professionnels impliqués, éventuellement révisable à la baisse) que d'un objectif organisationnel.
Si le rapport pointe l'effet négatif des dépassements d'honoraires sur l'accès aux soins, les sages ne proposent pas de système conventionnel unique revalorisé (mesure d'équité entre médecins aboutissant à la suppression des dépassements) mais des systèmes de plafonnement pour les dépassements comme pour les rémunérations conventionnelles (via des enveloppes limitatives, révisables à la baisse, pour les rémunérations conventionnelles, en cas de non respect des objectifs de dépenses de santé).
Si le rapport rappelle la prééminence de la rémunération à l'acte chez les médecins, les sages n'évoquent pas les forfaits "structure" ou "métier" et préfèrent développer la rémunération à la perfomance (comme actuellement la ROSP), objet de critiques en France comme en Angleterre.
Si le rapport alerte sur la dégradation de la démographie médicale, notamment en Médecine Générale, les sages en restent à un discours assez simpliste relevant plus de la gestion de produits manufacturés que de ressources humaines. Ne tirant aucun enseignement du succès des postes salariés mis en place par diverses collectivités territoriales, ils brocardent une fois de plus les mesures incitatives existantes alors que le premier plan national ne date que de 2013 et qu'il n'est constitué, comme le suivant, que de mesures à moyen terme ou de modestes mesures à effet immédiat voire de simples mesures "gadget". Ne tenant pas compte des effets limités, quand ils ne sont pas négatifs, des mesures contraignantes en vigueur à l'étranger, les sages proposent un conventionnement sélectif, à durée déterminée (soumis à recertification), alors que le nombre de médecins généralistes a diminué de 9,1% entre 2007 et 2017 (et qu'il continuera de diminuer pour quelques années encore) et qu'il n'existe plus de zone sur dotée en médecins généralistes de secteur 1 (les agglomérations de Paris et Toulouse sont sous la menace de devenir des deserts médicaux).
Si le rapport souligne l'engorgement des urgences hospitalières, les sages proposent d'augmenter le temps de travail des médecins de ville le matin et le soir et d'expérimenter une régulation médicale indépendante de l'hôpital pour mieux orienter les patients alors que les médecins généralistes en France sont parmi les médecins qui travaillent le plus en Europe (plus de 50 heures par semaine) et dans des conditions de plus en plus difficiles (propices au burn out) et que les deux principales motivations pour les patients de passer aux urgences sont de bénéficier d'un bilan complet immédiat (consultations et examens) et de pouvoir obtenir une hospitalisation.
Au final, le Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG) dénonce un empilement de mesures dirigistes pour le système de soins et brimant les médecins sans garantie d'efficacité ni en terme d'economies ni en terme d'accès aux soins :
Comment motiver avec un tel programme une profession, les médecins, qui présente avec les agriculteurs et les agents de police/gendarmerie le plus fort taux de suicide ? 
Comment résoudre avec de tels "remèdes" la crise d'attractivité de la Médecine Générale ? 
Comment à l'énoncé de ces propositions, ne pas se souvenir des décisions politiques désastreuses entre le fin des années 1980 et le début des années 1990 obtenues par de hauts fonctionnaires en vue de réguler la surabondance de médecins ? 
 
NB : La semaine dernière, le SNJMG a contribué à la consultation publique mise en place par le gouvernement en présentant ses propositions pour la nouvelle Stratégie Nationale de Santé.
 
Contact presse :
Emilie FRELAT - Présidente - 06 19 90 26 57- presidente@snjmg.org