Le secret des affaires plus fort que le droit à la santé et à l’information ? (avec l’assentiment de l’Ordre des médecins)

Dans le cadre d’une enquête collaborative (« Implant files ») ayant mis en exergue la dangerosité d’implants médicaux (défibrillateurs, pompes à insuline, prothèses de hanche – qui aurait causé 82.000 morts et 1,7 million de blessés aux USA en 10 ans), le journal Le Monde s’est vu refuser en 2019, d’abord par l’Ordre des médecins puis par la CADA (Commission d'Accès aux Documents Administratifs), l’accès à la liste des dispositifs ayant reçu un certificat de conformité et à celle des dispositifs recalés.

Le Monde a contesté ce refus en justice ; l’audience se tient ce jeudi 1er octobre au Tribunal administratif de Paris.

Le Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes (SNJMG), pionnier dans la lutte contre les liens d’intérêt en médecine, avait pointé les limites de la réglementation lors de la publication en 2013 du décret d'application de la loi Bertrand sur la transparence des avantages accordés par les laboratoires pharmaceutiques (NB : Loi résultant du scandale du Médiator, pour lequel le SNJMG avait été auditionné par la commission d’enquête de l’Assemblée Nationale).

Certes, la réglementation permet au site Euros for Docs de révéler que les laboratoires pharmaceutiques ont distribué plus de 6,6 milliards d’euros en France entre 2012 et 2019. Mais, la réglementation ne concerne que les avantages "en nature ou en espèces" reçus par les professionnels de santé et étudiants, ainsi que par les associations les représentant, les associations d'usagers du système de santé, les établissements de santé, les fondations, les sociétés savantes, les entreprises éditrices de presse, les éditeurs de logiciels d'aide à la prescription et à la délivrance ainsi que les personnes morales assurant la formation des professionnels de santé ; les conventions « avec contrepartie »  passées entre industriels et acteurs de santé ne sont pas concernées (NB : les conventions n’avaient pas été citées dans la loi de Mr Xavier Bertrand et elles avaient été – pour toute ou partie - exclues dans le décret de Mme Marisol Touraine).

C’est en sus de ces importantes limites à loi sur la transparence en santé que la transposition en juillet 2018 dans le droit français de la directive européenne sur le secret des affaires vient rajouter une couche d’opacité sur les liens d’interet en santé.

Aussi, le SNJMG apporte t il en toute logique son soutien aux 43 associations, médias et syndicats qui ont décidé de rejoindre le quotidien « Le Monde » pour demander à la Justice qu’elle protège la liberté de la presse, à plus forte raison lorsqu’elle enquête sur un sujet d’intérêt général aussi important que la santé.

Ceci est d’autant plus nécessaire que le secret des affaires risque d’être renforcé par la loi ASAP, en cours d’examen au Parlement.

Enfin, le SNJMG se désole de voir l’Ordre des médecins, pourtant garant de la déontologie professionnelle, refuser de communiquer, après « occultation des mentions non communicables » (selon la réglementation), les documents demandés par le quotidien Le Monde. L’argument que ceci représenterait un « travail trop important » est particulièrement malvenu alors que la Cour des Comptes vient de rappeler, suite à son rapport de Décembre 2019, que l’Ordre des médecins dispose de moyens financiers conséquents dont la gestion laisse à désirer…

 

Contact Presse : Benoit Blaes – presidence@snjmg.org – 07.61.99.39.22